Merci pour ton billet doux. Je sais que je ne peux pas garder tes lettres, comme tu ne peux conserver les miennes. Je n’arrive pas à croire que la fin de l’été est déjà là et qu’une fois encore, nous allons nous quitter. Toi, tu as l’air calme et confiant. Peut-être es-tu plus sage que je ne le suis. Tu sembles n’être en proie à aucune inquiétude, garder espoir en notre histoire, penser que tout va s’arranger. Je ne sais pas. Tu as une telle place dans ma vie depuis un an. Tu es la marée envahissant inexorablement le Gois. Comme lui, je me rends, encore et encore. Mais la peur cède vite à l’extase.

Souvent, elle me regarde bizarrement, et je sens que je dois être prudente. Mais comment pourrait-elle savoir quoi que ce soit ? Comment aurait-elle pu deviner ? Qui le pourrait ? Je ne me sens pas coupable car ce que je ressens pour toi est pur. Ne souris pas, je t’en prie. Ne te moque pas de moi. J’ai trente-cinq ans, je suis mère de deux petits et, avec toi, je me sens comme une enfant. Tu le sais. Tu sais ce que tu as provoqué en moi. Tu m’as rendue vivante. Non, ne ris pas.

Tu as des diplômes, un travail, un statut. Moi, je n’ai pas ton raffinement, ta culture. Je ne suis qu’une mère au foyer. J’ai grandi dans un village du Sud qui sentait la lavande et le fromage de chèvre. Mes parents vendaient des fruits et de l’huile d’olive sur le marché. Quand ils ont disparu, ma sœur et moi avons travaillé dans les halles du Vigan. J’ai pris le train pour la première fois à vingt-cinq ans. J’étais montée à Paris pour les vacances. Je ne suis jamais rentrée. J’ai rencontré mon mari dans un restaurant sur les grands boulevards. Je prenais un verre avec une amie. Voilà comment ça a commencé, entre lui et moi.

Je me demande parfois ce que, tu me trouves. Mais je sens que tu te rapproches de plus en plus, je le vois à la façon dont tu me regardes sans dire un mot. Tes yeux me veulent près de toi.

Demain nous appartient, mon amour.

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