Chapitre 5
Ainsi qu'il arrive lorsqu'on a beaucoup entendu parler de quelqu'un, peut-être trop, Angélique ne se sentait pas tellement empressée de connaître la fameuse Marcelline. Cette personnalité féminine dont la faconde et... la fécondité, la hardiesse et l'habileté à ouvrir les coquillages paraissaient avoir attiré toutes les sympathies masculines de la Baie Française, l'agaçait un peu à l'avance.
Mais Villedavray avait tenu parole. Il lui avait fait envoyer des plantes, des baumes dont elle pouvait apprécier l'efficacité. Déjà, le surlendemain, elle allait mieux et elle se devait de rendre au gouverneur une visite de bon voisinage. Elle prit le sentier qui reliait les deux domaines. Piksarett, le chef des Patsuikett, l'accompagnait. Il avait refusé de partir en éclaireur comme elle le lui demandait.
– Tu es en danger, lui avait-il déclaré. Il ne serait pas intéressant pour moi de te perdre avant d'avoir obtenu ta rançon. Uniacké et son frère iront jusqu'à la côte chercher l'homme-du-tonnerre. Donne-leur un message pour lui. S'il le trouve, peut-être viendra-t-il au-devant de toi.
Mais à l'instant d'écrire ce message, elle n'avait su que lui dire : l'avertir ? « Je suis à Tantamare... Je vous attends... Je vous aime... »
Soudain le lien qui la reliait à lui semblait s'être non pas rompu, mais comme perdu dans une obscurité profonde. Qu'était-il arrivé ?
Elle froissa le papier, le jeta.
– Que les Mic-Macs lui racontent ce qui est arrivé : que j'ai fait naufrage, qu'on a tué Hubert d'Arpentigny, qu'on a voulu attenter à ma vie, que je suis ici...
Les deux sauvages étaient donc partis. Elle préférait ne pas se séparer des gens de Gouldsboro, ni de Cantor