Chapitre 7
Angélique avait décidé de reprendre le pourpoint de Joffrey à Ambroisine. Elle guetta le départ de son ennemie pour la messe.
Elle vit toute une compagnie, la « Bienfaitrice » en tête, se diriger vers le promontoire où la cloche de la petite chapelle appelait les fidèles.
Ici à Tidmagouche, la duchesse paraissait tenir sa cour à l'instar d'une reine. Arrivée la première, elle s'était solidement implantée. Angélique aurait du mal à la détrôner. Il lui fallait non seulement ses filles, son secrétaire, Job Simon, pour l'escorter, mais encore ses admirateurs et soupirants au grand complet. Nicolas Parys était là ainsi que quelques-uns de ses hôtes la veille, y compris le capitaine du morutier, bon nombre des pêcheurs bretons et naturellement Villedavray, très détendu, faisant des ronds de jambe, et suivant le sentier sablonneux avec autant de grâce et d'apprêt qu'une allée de Versailles.
Dès que le cortège eut disparu au tournant du bois, Angélique se précipita dans la demeure d'Ambroisine. Elle se saisit du pourpoint de Joffrey et le serra sur son cœur. Puis elle regarda autour d'elle.
L'idée lui vint de profiter de cet instant pour essayer d'en savoir plus long sur son ennemie. Elle commença d'ouvrir les coffres, les sacs, les tiroirs des meubles.
Elle retournait des étoffes, des lingeries. Il en émanait ce parfum envoûtant qui avait frappé Angélique dès l'instant où la duchesse avait mis les pieds sur la plage.
Instant étrange, hors du temps, sans dimension. Elle frissonnait en y songeant. Quelle en était la signification invisible ?
D'où tenait-elle toutes ces robes, cette naufragée ?... Les coffres étaient pleins. Présents de ses admirateurs, de Joffrey ?... Une brusque douleur la tenailla. Mais elle s'interdit de penser plus loin.
Elle continua ses investigations, mais ne retint rien qui pût l'éclairer. Tout à coup, de la poche d'une robe, un pli tomba. C'était une lettre de plusieurs feuillets. Angélique la ramassant la reconnut au premier coup d'œil : c'était la lettre du père de Vernon.