Blaye Épilogue pour la grande aventure de « Petit-Pierre »…

Dieu veut peut-être que les rênes de ce peuple

soient renouées par une jeune princesse…

CHATEAUBRIAND

Un jour de novembre 1832, les habitants de la petite ville de Blaye en Gironde – bien petite depuis que Vauban l’a en partie dévorée pour construire la superbe citadelle qui domine et défend l’estuaire – se bousculent devant la grille de l’hôtel de ville pour lire la proclamation que l’on vient d’y accrocher par ordre du sous-préfet :

« Habitants de Blaye, cette même citadelle qui, par vos courageux efforts, conserva la dernière son pavillon tricolore aux jours de 1814, renfermera aujourd’hui, captive et impuissante, la dernière espérance de l’absolutisme. Le règne des lois, le triomphe de l’ordre reçoivent de ce grand événement un nouveau gage de force et de durée… »

Ce beau morceau de rhétorique officielle fleurant encore le style ampoulé si fort à l’honneur sous la Révolution est apparemment destiné à exciter une sorte d’horreur sacrée chez les bourgeois et les pêcheurs de lamproies de Blaye envers le monstre terrifiant que l’on va mettre en cage derrière les gros murs de la forteresse qui fait la gloire du port girondin. Pour un peu, emporté par son sujet, le sous-préfet demanderait que l’on gare les femmes et les enfants et que l’on barricade les maisons sur le passage de « la dernière espérance de l’absolutisme »…

En fait, la future prisonnière est un petit bout de femme d’un mètre cinquante à peine, âgée de trente-quatre ans depuis le 8 de ce mois de novembre. Et, malheureusement pour la prose préfectorale, les Blayais la connaissent bien pour l’avoir acclamée lorsqu’elle est venue chez eux, quatre ans plus tôt, au cours d’un long voyage dans l’Ouest et le Sud-Ouest. Évidemment, elle n’était pas alors la dernière espérance de l’absolutisme mais une charmante princesse, Son Altesse royale Madame la duchesse de Berry, née princesse Marie-Caroline des Deux-Siciles et mère de l’héritier du trône de France, le jeune duc de Bordeaux, dit « l’enfant du miracle » parce qu’il avait vu le jour plusieurs mois après la mort de son père, poignardé par Louvel à la sortie de l’Opéra.

En dépit de ses titres imposants, les gens de Blaye ont gardé le meilleur souvenir de cette jeune femme vive, aimable et spontanée, aussi peu altesse royale que possible et qui moissonnait les cœurs avec une aisance à laquelle on n’était pas habitué.

Aujourd’hui, le décor et les circonstances ont changé. Louis-Philippe, installé par la révolution de Juillet, règne à la place de Charles X. Il est l’oncle de la duchesse mais il est aussi pour elle l’usurpateur et elle vient de faire d’héroïques efforts pour le jeter à bas de son trône. Cela fait la différence…

Mais, cette différence, elle ne l’accepte pas et elle ne l’acceptera jamais. Pour elle, le seul roi digne de régner sur ce beau pays de France, c’est son fils âgé de douze ans et que les légitimistes appellent déjà Henri V. L’enfant pour lequel, depuis sa naissance, elle a tout admis, tout accepté, tout supporté, tout tenté jusqu’à la folle mais héroïque aventure qui l’amène captive à Blaye, ce 15 novembre 1832, vaincue mais non soumise…

Quand la révolution de 1830 a chassé Charles X et sa famille des Tuileries, celle que l’on a surnommée la duchesse « Vif-Argent » les a suivis en Angleterre mais n’a pu se résoudre à y rester longtemps. Elle s’est toujours mal entendue avec sa belle-sœur, la sévère duchesse d’Angoulême, en qui ceux qui l’ont connue enfant ont bien du mal à reconnaître la fille de l’éblouissante Marie-Antoinette, et pour elle il y a mieux à faire que dire des prières et se lamenter. Marie-Caroline ne croit pas à la solidité du trône de Louis-Philippe et, le 17 juin 1831, bien décidée à lui arracher sa couronne, elle a quitté l’Angleterre avec une poignée de fidèles ; après quelques tribulations elle s’est installée en Italie, à Massa di Carrara, chez le duc de Modène. Là, elle a reçu des centaines de lettres venues de France. Les légitimistes, sachant qu’elle refuse la défaite, se sont rués sur leurs plumes. On l’appelle ! On la réclame ! On lui répète que c’est à la Vendée, toujours si fidèle, qu’il faut confier le sort du Prétendant. À la Vendée dont elle garde un si vivant souvenir…

Parmi ces lettres, certaines sont signées de Chateaubriand, d’autres du grand avocat Berryer qui l’adjure : « Hâtez-vous d’accourir ou nous ferons le soulèvement sans vous… » Et elle va accourir, persuadée que tout l’Ouest l’attend les bras ouverts et l’arme au pied. Elle se sent tous les courages. Elle n’en manque pas, cette petite femme au cœur bien placé, car une épidémie de choléra fait rage en France et elle le sait. Elle partira quand même…

Le 30 avril 1832, la duchesse de Berry déguisée en mousse débarque d’un petit bateau à Sainte-Croix près de Carry-le-Rouet, en compagnie de deux ou trois amis dont son écuyer inamovible, l’excellent comte de Mesnard. Elle pense y retrouver deux mille partisans : il n’en est venu que soixante… et encore ! Un mouvement de troupe les a égaillés comme moineaux. Cela ne décourage pas pour autant la duchesse : on ira en Vendée !

Et elle y va. À pied d’abord puis à cheval, en voiture et même à dos d’âne. Le 7 mai, elle arrive au château de Plassac près de Saintes où elle trouve un accueil chaleureux chez les Dampierre. Certaine que toute la province va se lever à sa voix, elle refuse d’écouter le baron de Villeneuve quand il essaie de lui expliquer que les choses ont peut-être changé, qu’on n’a peut-être pas tellement envie de se battre pour ce qui n’est, au fond, qu’une querelle de famille : branche aînée contre branche cadette…

Après dix jours de repos à Plassac, la duchesse pénètre enfin en Vendée et gagne Montaigu où le baron de Charette vient à sa rencontre. Charette ! Quel beau nom pour une insurrection ! Presque un drapeau !… Par des chemins détournés, Charette conduit Marie-Caroline au château de Preuillé, chez le colonel de Nacquart qui l’accueille avec respect mais non sans inquiétude. Une inquiétude qu’il ne songe pas à dissimuler :

— Nul n’attend Madame. La Vendée n’est pas prévenue et la présence de la mère d’Henri V va attirer tous les malheurs sur le pays…

C’est peu agréable à entendre mais, en ce qui concerne « la mère d’Henri V », il ne saurait en être question. Ce n’est pas une princesse qui va entrer en guerre, c’est un jeune partisan, un paysan comme les autres et avec qui les autres se battront mieux. Et, le lendemain, la duchesse apparaît vêtue d’un pantalon de coutil bleu, d’une veste noire à boutons de métal ouvrant sur un gilet jaune, d’une blouse de paysan et d’une paire de sabots. Une perruque foncée couvre sa chevelure blonde et par-dessus elle a enfoncé un bonnet de laine.

— Voilà ! dit-elle. À présent, je suis Petit-Pierre. Bien malin qui me reconnaîtra sous cette défroque.

Elle pétille de vie, elle éclate d’espérance et son enthousiasme est communicatif. Et puis jamais elle ne s’est autant amusée ! À l’aventure se mêlent son goût du théâtre et sa passion du risque. Et puis, bientôt Petit-Pierre a un compagnon : Petit-Paul, autrement dit Stylite de Kersabiec, une jeune Vendéenne un peu exaltée qui se voue corps et âme au service de Madame. Ces deux gamins vont faire une fameuse paire que rien ne rebutera : ni la fatigue, ni le mauvais temps, ni les dangers toujours présents comme dans cette chaumière cernée par les soldats de Louis-Philippe et dont Petit-Pierre sort tranquillement en vidant un bol de cidre. On couche sur la paille ou au creux d’une haie, on trinque avec les paysans. C’est une vie merveilleuse au milieu d’une poignée de braves parmi lesquels se distingue Achille Guibourg, un jeune avocat nantais qui se veut le chevalier de Petit-Pierre. On fait le coup de feu au coude à coude, on passe des nuits à la belle étoile…

Pourtant, les déceptions s’ajoutent aux déceptions. La Vendée ne se soulève pas du tout. Elle n’a plus envie de se battre. L’ordre de soulèvement qu’a promulgué la duchesse risque fort de rester lettre morte. Et Marie-Caroline ne comprend rien à ce qui lui arrive ! Là-bas, à Massa, elle recevait des centaines de lettres qui l’appelaient, la suppliaient de venir se mettre à la tête des troupes fidèles. Et voilà que les troupes fidèles n’existent pas, qu’on l’a leurrée et qu’elle s’est jetée sur ce leurre ? Mais tout cela ne peut pas être vrai ? Ce n’est pas possible ? Ces gens ne savent pas ?

Pauvre Petit-Pierre ! Pauvre brave petit soldat qui ne demandait pas mieux que de mourir pour sa cause ! Les chefs qui se sont présentés se rétractent à présent et, à Paris, le comité légitimiste prend peur. Il envoie Berryer, l’homme qui voulait que Madame se hâtât pour ne pas manquer le début du soulèvement. Il tient aujourd’hui un tout autre langage : « Le seul nom de chouans amènerait même les gens d’opinions paisibles à lutter contre les légitimistes… » Il y aura aussi une lettre de Chateaubriand…

Ce qu’il y a surtout, c’est que Paris a envoyé le maréchal de Bourmont avec des troupes et que les forces sont disproportionnées. Dans un moment de découragement, Petit-Pierre décommande le soulèvement, puis se reprend. La raison en tient tout entière dans son caractère héroïque. Elle dira : « J’aime mieux mourir sur cette noble terre que d’accepter pour moi et pour ma famille la fin des Stuarts… » Le soulèvement aura lieu dans la nuit du 3 au 4 juin.

En attendant, on mène la guérilla. On tiraille dans les haies et dans les bosquets autour du lac de Grandlieu. Les Bleus ont l’avantage du nombre et multiplient les perquisitions. Qu’importe ! Dans la nuit du 3, le tocsin sonne pour de maigres troupes qui convergent vers Maisdon, entre Sèvre et Maine, cette Maine dans laquelle, il y a quelques jours, Marie-Caroline a failli périr noyée. Il ne faut pas un quart d’heure à Bourmont pour les disperser. La troupe de Charette se fait mettre hors de combat au hameau du Chêne et Charette ne pense plus qu’à sauver Petit-Pierre qui s’enfuit à travers la nuit avec Achille Guibourg, lequel sera pris un peu plus tard et envoyé aux prisons de Nantes.

Un seul combat, mais héroïque, au manoir de La Pénissière. Dans la nuit du 5, une soixantaine d’hommes aux ordres des quatre frères de Girardin, d’Athanase de Guinefolle et de Louis de Chevreuse, se font encercler. Ils se battent trop bien. Alors on les enfume comme des renards. On met le feu au toit. Tout brûle autour d’eux mais ils se battent toujours en chantant le Miserere. Quelques-uns tentent une sortie, la réussissent, mais huit d’entre eux veulent rester jusqu’au bout pour l’honneur du drapeau blanc aux fleurs de lys.

Quand ils cessent de tirer et que le silence revient, les troupes s’éloignent tandis que le manoir achève de brûler. Les défenseurs ne peuvent vivre encore dans ce brasier. Pourtant, ils sont toujours vivants et sortent enfin, roussis sur toutes les coutures pour se perdre dans la nuit et se jeter dans la première rivière.

Et Petit-Pierre dans tout cela ? Au lendemain du combat du Chêne, elle est restée cachée dans un fossé boueux jusqu’à ce que la route soit libre. Elle abandonne le combat en campagne pour ne pas provoquer d’autres morts, mais elle n’abandonne pas la lutte. Elle veut se rendre à Nantes où elle sait trouver un refuge. De là, elle correspondra avec les puissances étrangères, avec les rois qui sont ses frères ou ses cousins, elle pourra fanatiser ses fidèles, ranimer la flamme vacillante et attendre dans l’ombre le moment inéluctable où s’écroulera le trône de Louis-Philippe. A-t-on jamais vu un roi avec un parapluie pour sceptre ?

Elle quitte, non sans regrets, le costume de Petit-Pierre pour celui d’une paysanne : coiffe, tablier et sabots puis, toujours flanquée de Mlle de Kersabiec habillée de même, elle prend un panier de légumes et entre à pied dans Nantes, un jour de marché. C’est le 6 juin. Il fait beau et Marie-Caroline s’accorde de flâner un moment avant de gagner le refuge dont elle ne pourra plus sortir. Elle va même lire, tout en croquant une pomme, l’un des placards apposés sur les murs de la ville et qui donnent son signalement. Ce qui l’amuse beaucoup. Puis, elle gagne le n° 3 de la rue Haute-du-Château.

Là habitent deux vieilles filles, plus riches d’ancêtres et de noblesse – la leur remonte sans faiblir jusqu’au XIVe siècle – que d’écus : les demoiselles du Guiny. Elles sont légitimistes passionnées, vaillantes et de cœur haut placé. Barbey d’Aurevilly a décrit, dans Le Chevalier Destouches, des femmes de cette trempe, fidèles, courageuses et sachant se taire, par le truchement des demoiselles de Percy et de Touffedelys. Telles sont les demoiselles du Guiny, surtout l’aînée, Pauline. Aussi, quel que soit le danger que représente la présence de Madame, n’hésitent-elles pas à l’affronter. Elles ont déjà, d’ailleurs, un assez dangereux pensionnaire : Achille Guibourg, qui a été arrêté, s’est échappé du château de Nantes et a précédé la duchesse chez les demoiselles du Guiny. Autant le dire tout de suite, il est « très attaché » à l’ex-Petit-Pierre. Attachement payé de retour ainsi que le révélera la suite de l’histoire. C’est grâce à lui que l’asile des demoiselles du Guiny a été ouvert à Marie-Caroline…

Celle-ci s’installe au troisième étage de la maison en compagnie de Mlle de Kersabiec. Leur logis est une mansarde succinctement meublée mais pourvue d’une cheminée intéressante car la plaque qui en constitue le fond bascule, dévoilant une cachette. Les repas sont pris en commun au second étage et la duchesse se trouve bien dans cette maison amie. Il y a autour d’elle Stylite et sa sœur Eulalie venue la rejoindre, le bon Mesnard… le cher Guibourg ! Elle entreprend sans tarder une énorme correspondance avec toute l’Europe, que son courage et son obstination finissent par remuer un peu.

À Paris, cependant, on s’inquiète, on s’énerve. M. Thiers vient de prendre le portefeuille de l’Intérieur et aimerait inaugurer son ministère en mettant la main sur la duchesse de Berry. Il trouvera, hélas, l’homme qu’il lui faut dans un misérable, un certain Simon Deutz, un juif converti au catholicisme. La duchesse connaît ce Deutz depuis Massa où il s’était présenté à elle comme mandataire du pape. Du pape qui n’a jamais voulu lui confier quelque message que ce fût. Mais, ignorant ce détail, Marie-Caroline a confiance en lui, et c’est cette confiance qu’il va monnayer : il demande 500 000 francs !

Thiers a tiqué. Judas était moins cher, mais qui veut la fin veut les moyens et Deutz aura son argent quand la duchesse sera prise. Deutz assure qu’il réussira et part pour Nantes en compagnie du nouveau préfet.

Le 31 octobre, il est reçu par la duchesse à laquelle il « apporte des nouvelles du Portugal ». Une seconde audience lui est assignée pour le mardi 6 novembre. Deutz vient vers quatre heures, reste une heure et ne s’éloigne qu’après avoir constaté que la table est mise pour sept personnes et que Madame va souper ici. Ce soir-là, en effet, outre les habitués, il y a la baronne de Charette.

Vers cinq heures et demie, comme, réunis dans la chambre de Mlle Pauline, on bavarde en regardant se lever la lune, Guibourg qui est debout près de la fenêtre voit soudain luire des baïonnettes et constate que des troupes encerclent silencieusement la maison. Aussitôt, on se précipite au troisième, on ouvre la plaque de la cheminée. Mesnard et Guibourg se glissent les premiers dans la cachette, puis la duchesse et Stylite. Il est temps. La maison est envahie. On fouille partout mais on ne trouve rien. On commence à sonder les murs. Sans succès. Alors le gros de la troupe se retire, laissant des gardes dans toutes les pièces.

Deux gendarmes sont installés dans la chambre où se cachent les fugitifs. Comme la nuit est humide, ils font du feu avec des papiers, au grand affolement des captifs de la cheminée. Heureusement, le feu s’éteint. Les hommes n’ont pas cherché à l’entretenir et l’air qui passe à travers les tuiles du toit ranime les occupants de la cachette.

Hélas, au matin, ayant froid de nouveau, les gendarmes rallument le feu et cette fois ils l’entretiennent. La plaque devient brûlante. Le bas des robes commence à prendre feu et la fumée envahit l’étroit espace. Alors, Marie-Caroline se rend…

Sur son ordre, Mesnard et Guibourg ouvrent la plaque. On éteint le feu et les gendarmes éberlués voient une petite femme couverte de poussière, aux vêtements roussis, qui sort de la cheminée à quatre pattes et leur dit :

— Je suis la duchesse de Berry. Vous êtes français et militaires. Je me fie à votre honneur…

Et, sans rancune, elle leur sourit. Elle n’est même pas abattue par ces seize heures de cauchemar.

Une heure plus tard, au bras du général Dermoncourt, elle quitte la maison des demoiselles du Guiny pour les prisons du château de Nantes. Deutz a gagné son argent, qu’on lui tendra, dit-on, avec des pincettes. Il a gagné aussi la flétrissure que lui infligera Victor Hugo, indigné :

Rien ne te disait donc dans l’âme, ô misérable !

Que la proscription est toujours vénérable,

Qu’on ne bat pas le sein qui nous donna son lait,

Qu’une fille des rois dont on fut le valet

Ne se met pas en vente au fond d’un antre infâme

Et que n’étant plus reine elle était encor femme…

L’aventure de Petit-Pierre est terminée. Il va falloir, à présent, en payer le prix…

À la nuit close, ce 15 novembre, le bateau qui amène à Blaye la duchesse de Berry et ses deux derniers compagnons, Mesnard et Mlle de Kersabiec, jette l’ancre dans la Gironde. Le général Janin et son aide de camp prennent un canot pour aller chercher les prisonniers qu’accompagnent, depuis Nantes, le colonel Chousserie et son officier d’ordonnance. Un officier qui s’appelle… Petitpierre ! Le destin a de ces jeux !

Le roman cependant n’est pas terminé. Au bout de quelques mois, le général Bugeaud, qui est commis à la garde de la duchesse, constate que la taille de sa prisonnière a tendance à s’arrondir. Certes, elle n’a jamais perdu son bel appétit, mais tout de même ! Et il finit par lui faire avouer l’invraisemblable : elle est enceinte ! Mais de qui ?

La duchesse déclare qu’elle s’est mariée secrètement en Italie mais refuse de donner un nom.

Le gouvernement de Louis-Philippe pourrait étouffer le scandale, mais il n’en fait rien. Bien au contraire. Il faut donner le plus de publicité possible à cet événement qui ridiculise les Bourbons aînés. Il faut plonger dans la honte le courageux « Petit-Pierre ». Plus il y aura de boue sur sa légende et mieux cela vaudra !

Dès lors, la duchesse est surveillée plus que jamais. Le général Bugeaud couchera pratiquement devant sa porte et il assistera à l’accouchement qui a lieu le 10 mai 1833. Il s’agit d’une petite fille que l’on baptise Anne-Marie-Rosalie.

Cependant, affolés, les partisans, les amis cherchent une solution. Ils ont repris celle que Madame a proposée : elle est secrètement mariée… Et l’on cherche. Et l’on trouve : « Madame » a épousé le comte Hector Lucchesi-Pali, des princes de Castel Franco, qui lui a parfois rendu visite à Massa. Et c’est lui qui, un beau jour, vient gravement chercher « son épouse » quand, enfin, les portes de la forteresse de Blaye s’ouvrent devant celle qui n’est plus que Mme Lucchesi-Pali. Donc, à présent nullement dangereuse.

Mais personne n’est dupe. Au moment de la conception de l’enfant qui n’a pu avoir lieu qu’à Nantes, Lucchesi-Pali était en Hollande. Mais Achille Guibourg, lui, était là. Achille Guibourg qui était jeune, beau, plein de charme et qui était passionnément amoureux de la duchesse « Vif-Argent »…, de son gentil compagnon de combat.

Achille Guibourg que Marie-Caroline ne pouvait pas épouser… et qu’elle ne reverra jamais…


Aujourd’hui, la citadelle de Vauban est inscrite au patrimoine mondial de l’Unesco.

En saison, visite de la citadelle par les souterrains pour comprendre le génie de Vauban.

Pour les jours et heures de visite, se renseigner auprès de l’Office du Tourisme : 05 57 42 12 09.

Загрузка...